Les Accents têtus

Les sauveurs du pays imaginaire

Je ne savais pas ce qui m’attendait en allant à la campagne pendant les vacances. Au début j’avais grogné pour partir. J’allais laisser mes amies, internet et ma maison. En plus, ce n’était pas pour moi qu’on y allait c’était pour le travail de mes parents : ils étaient chercheurs de familles d’accueil pour orphelins. Et il se trouvait qu’en Bretagne, on avait découvert un petit garçon seul dans la forêt.
Le voyage fut long mais arrivés dans le village, nous fumes très gentiment accueillis par les habitants. De là, des policiers nous accompagnèrent jusqu’au pays imaginaire : c’est ainsi qu’était appelée la forêt. Au milieu s’y trouvait le petit garçon, il s’appelait Peter. Il était dans sa cabane attendant que l’on vienne le chercher. Je montai en premier, Peter avait l’air heureux de vivre dans cette cabane. Il pouvait en être fier : c’était du travail de chef, il y avait une table, un lit, des tabourets, un toit imperméable, tout ce dont on avait besoin pour vivre. A ce moment je me suis demandé s’il était vraiment seul et depuis combien de temps il vivait ici. Les policiers l’emmenèrent au commissariat. Mes parents et moi les accompagnâmes. Peter fut conduit dans une salle noire. Nous nous assîmes en face de lui. Mes parents commencèrent à lui poser des questions :

–  Depuis combien de temps vis-tu dans la forêt?, lui demandèrent-t-il.
–  Je ne sais pas, au moins deux ans, répondit-il.
–  Quel âge as-tu?
–  Douze ans, je crois.
–  Pourquoi es-tu seul?
–  Le jour de mes dix ans mes parents m’ont emmené faire un tour en forêt. On a construit la cabane dans laquelle vous m’avez trouvé. Puis on est rentré chez nous et là sans que l’on sache pourquoi, une balle les a transpercés et ils se sont étalés par terre. De peur que quelqu’un me tue, je suis parti me réfugier dans ma cabane et je ne suis plus sorti du pays imaginaire, mais je ne suis pas vraiment
seul.
–  Comment ça?
–  En fait quand je me suis réfugié dans la forêt, j’ai trouvé trois garçons dans ma cabane et ils étaient dans la même situation que moi : leurs parents avait été assassinés.
–  Demain pourras-tu nous les présenter?
–  Je vais essayer, mais je ne vous promets rien, ils sont très timides.

Après ces révélations, mes parents étaient secoués, la police aussi car elle cherchait ces enfants depuis quelques semaines. Comme d’habitude, on hébergea le garçon dans notre nouvel appartement, le temps qu’il trouve une famille. Le soir vint, je dormais dans la même chambre que Peter. Soudain, je l’entendis passer par la fenêtre. Au début je n’y ait pas fait attention mais après avoir réfléchi quelques secondes je me souvins que l’on était au troisième et dernier étage de l’immeuble ! Je me précipitai alors vers la fenêtre espérant retenir Peter avant qu’il ne tombe. Mais je le vis suspendu dans les airs entouré d’une poussière dorée. Je perdis connaissance, pencha dangereusement par dessus la fenêtre. Et je tombai, quand je sentis des petits bras m’attraper et m’emmener loin du sol et de l’immeuble.
Je me réveillai face contre terre, entourée de quatre garçons dont Peter. Je me levais d’un coup, ce qui les surprit. Il faisait nuit noir, on voyait les étoiles briller malgré la densité du feuillage des arbres. Les garçons ne s’étaient pas enfuis, ils me regardaient comme si j’étais une extraterrestre mais aussi avec nostalgie comme si je leur rappelais quelque chose… ou quelqu’un ! Une pensée me traversa l’esprit, une chose horrible, et si en me regardant ils pensaient à leurs mères. Je ne sais pas pourquoi mais à ce moment là je commençai à entonner une chanson : une chanson sur les mamans. Des larmes me montèrent aux yeux, et visiblement à eux aussi. Quand j’eus fini, le plus petit me regarda et me dit :

«  - Comme c’était beau !
–  Merci, lui répondis-je, Comment vous appelez-vous ?  »

Ils se présentèrent tour à tour. Le plus petit se nommait Michel, le brun s’appelait Jean, il était un peu plus jeune que Peter et le dernier s’appelait Pierre. Tous y comprit Peter avait dans leurs yeux une lueur de tristesse. Il y eu un silence que je décidai de rompre pour poser une question cruciale :

«  - Pourquoi après la mort de vos parents n’êtes vous pas aller voir la police ?
–  Nous avions trop peur et ensuite il s’est passé quelque chose de magique…
–  Quoi ? !
–  Le soir de notre rencontre, une nuée de fée nous a entouré. Elles nous on dit que nous étions les élus : les enfants perdus et qu’il fallait que nous sauvions la forêt de ceux qu’elles appelaient les pirates. Puis elles nous ont donné leur poussière pour que nous puissions volér.
–  Qui sont ces pirates ?
–  Ce sont les employés de l’usine de charbon, on les appelle comme ça car ils volent la forêt et la polluent. Leur chef c’est le capitaine Attelle.  »

Les garçons m’expliquèrent en détail : le jour où leurs parents avaient été assassinés ce n’était pas les parents qu’on visait mais eux, les enfants. Car une prophétie expliquait que quatre garçons allaient détruire le Jolly Roger : l’usine de charbon, les quatre garçons du village, les plus proche de la nature. Une fée qui aimait le capitaine pour sa galanterie lui avait divulgué cette prophétie, malheureusement elle avait fini brûlée avec le bois.
A la fin de leurs explications, je décidai de tout raconter aux parents, mais ils m’en empêchèrent en m’expliquant que personne ne croirait cinq enfants qui, pour certains, s’étaient enfuis de leur immeuble. C’est à ce moment là que j’eu une idée. Si on ne pouvait pas compter sur les adultes, il allait falloir se débrouiller seul. Mon idée était donc de s’infiltrer dans l’usine pendant la nuit, de bloquer leurs tracteurs et de faire disjoncter l’ensemble de leur système électrique. Je leur fis donc part de ce plan. Nous étions tous d’accord. Ils me donnèrent un peu de poussière de fée et nous nous envolâmes dans la nuit noire.
Arrivés devant l’usine, nous atterrîmes par le conduit de cheminé, en retenant notre respiration. Michel, Jean et Pierre s’occupèrent des tracteurs, pendant que Peter et moi nous nous dirigeâmes vers la salle de commande. La salle en question était gigantesque : il y avait un écran de vidéo surveillance, une table de bord permettant d’éteindre et d’allumer la lumière, mettre en marche les fours et les tapis roulants, ce genre de chose. Peter, ingénieux, commença à dévisser les plaques de fer sous la table, permettant de retenir les fils électriques. Avec des ciseaux nous coupâmes les fils. Malheureusement, une alarme se déclencha, alertant tout de suite les patrouilles de police. Nous entendîmes les sirènes, puis les pas dans les escaliers de la tour de contrôle et soudain plus rien. La dernière chose que je sentis fut l’odeur d’un tissu sur ma bouche.
Je me réveillai quelques heures plus tard, au petit matin, seule, dans la même salle noire où mes parents avaient interrogé Peter, elle me parut plus obscure que la veille. J’entendais mes parents renter en me disant «  Wendy, Wendy, qu’est ce que tu as fait?!  ». Dans ces moments là il faut savoir que mes parents sont très à cheval sur la discipline. Sur le moment j’allais tout leur dire, mais je me rappelai de l’avertissement de Peter. Qu’allais-je donc leur répondre? Le stress m’envahit. Je gardais en moi un trop gros secret. Je n’aurais jamais dut écouter les garçons. Je restai donc muette attendant que mon tour vienne.
Peter sortit de la salle d’interrogatoire : c’était à moi. Je quittai mes parents et entrai dans une grande salle blanche avec une table, une chaise et un tabouret. Sur la chaise était assit le policier. Ce dernier commença à m’interroger:

«  - Que faisiez-vous dans l’usine la nuit dernière?
–  Qu’est-ce que Peter vous a dit?
–  Je ne dois pas vous le dire. Répondez à ma question.
–  Je ne dirai rien tant que vous ne me direz pas se que Peter vous a dit.
–  Votre ami Peter nous a raconté qu’il voulait protéger la forêt de la destruction et que c’est pour ça que vous vous êtes introduit dans le Jolly Roger. Est ce pour cela?
–  Oui.
–  Savez vous que cette raison n’est pas recevable?
–  Oui, mais vous savez, Peter, il a perdu ses parents, le pays imaginaire fut en quelque sorte sa
deuxième famille. Il n’accepte donc pas qu’on la détruise!
–  Je comprend… Vous pouvez disposer.  »

Quand j’eus fini je soufflai un bon coup, fier de mon argument. Maintenant, je savais exactement ce qu’il fallait faire. Je pris les garçons et mes parents par la main et nous courûmes jusqu’à la cabane de Peter. Mes parents essoufflés commencèrent à me crier dessus, je ne les écoutais pas. Je demandais à Peter d’appeler les fées. Il exécuta mon ordre mais seulement trois fées vinrent vers nous. Mes parents commençaient à se demander s’ils n’étaient pas fous. Les fées formèrent des silhouettes, avec leur poussière, tout en racontant la prophétie et l’histoire des enfants perdus. C’était très impressionnant ! Mes parents crurent tout ce qu’ils virent. Ils se rendirent alors au commissariat. A partir de ce moment tout alla très vite. Mes parents amenèrent le capitaine de la police, le capitaine Attelle et une poignée de policiers et d’employés dans la foret et leur montrèrent le spectacle des fées sur la prophétie et l’histoire des garçons. Les policiers allèrent récupérer des preuves sur les scènes des meurtres des parents des enfants perdus. Toutes les preuves désignaient le capitaine Attelle. Ce dernier fut arrêté, donc la forêt préservée.
Peter et Pierre furent adoptés par la même famille. Ils étaient heureux et en plus leur nouvelle maison était à la lisière de la forêt. Quant à Michel et Jean, ils devinrent mes petits frères et nous rentrâmes chez nous. Ces vacances furent mouvementées mais elles furent les plus belles de toute ma vie.

Prune

09/01/2017